Pour Sarah Smith

Voilà déjà des jours que nous nous connaissons. Arrivé dans ce pensionnat aux milles merveilles, j'ai passé la porte en pensant y trouver un refuge, un lieu où échapper, ne serait-ce qu'un peu, aux lourds fantômes de mon passé. Je recherchais un endroit où me cacher, où me réfugier. Un endroit où je serais quasiment enterré, où je pourrais presque me laisser mourir. Alcool et cigarette pour seuls compagnons, je préservais les élèves, et me détruisais. Cela aurait pu durer encore des années. Des années, en plus de celles m'ayant déjà détruit, des années qui auraient terminées de prendre ma santé mentale et physique, me laissant dévorer par le chagrin éternel de la solitude et de la mort.

Puis est venu ce jour où, pour la première fois, au-delà de l'odeur de la mort qui me suivait éternellement, j'ai senti ton parfum. tu étais là, assise au réfectoire, lisant un livre. Tu sentais la rose et le jasmin, parfum de ce savon qui avait dû frôler ta peau si tendre le matin même. J'observais tes sourcils légèrement froncés, ton profil, tes lèvres entrouvertes, si rouges, si belles. Tu étais là, je vivais, je mourrais de ne pas te parler dès ce moment où je t'ai vraiment vue. Puis la cloche a sonné, tu t'es levée, tu es partie.

J'aurais pu vivre dans ton souvenir. Mais la vie nous a permis de nous trouver. Mieux, de te parler, de te toucher. Je suis une loque, Sarah. Je suis un alcoolique, bon à rien, adorant boire jusqu'à s'en mettre au sol. Mais plus que tous ces vices, j'ai un cœur à t'offrir, un amour à déposer à tes pieds, une vie pour te combler. Je peux revivre si tu me permets d'entrer dans ton cœur et de m'y installer. Si tu acceptes d'être à moi. Si tu acceptes que nous puissions construire à deux cette vie si courte mais si riche.

Je veux nous imaginer tous les deux, à l'âge vieillissant. Je veux nous voir assis sous le porche d'une maison, main dans la main, alors que nos enfants et nos petits-enfants grandiront libres et heureux. Je veux voir ton ventre s'arrondir par l'enfant que tu porteras, cet enfant qui sera mon fils. Je veux te voir danser à mes côtés, ensemble. Je veux te donner ce que je n'ai pu donner autrefois car la mort s'en est mêlée. Je vit, Sarah, et je veux tu fasses partie de ma vie.

Sarah. Veux-tu devenir ma femme ?