Avril 1932. Les soucis mondiaux s'étendent.
 
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 Un mal nécessaire

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MessageSujet: Un mal nécessaire   Un mal nécessaire EmptyVen 1 Jan - 11:58

Naoki Nakajima, 81 ans

Ces derniers temps, Naoki ne quittait plus vraiment sa chambre, si ce n’est pour se laver, faire quelques pas parfois dans le jardin, puis il retournait se reposer. Sa belle-fille prenait soin de lui, jour après jour, lui apportant à manger, parfois l’aidant à avaler ce qu’elle lui préparait, elle le soutenait pour l’habiller et l’écoutait, lorsqu’il avait besoin de quelque chose. Les jours et les saisons s’écoulaient avec une certaine lenteur. Il se sentait comme… détaché. Bien des événements avaient pourtant secoué une partie de la famille, ces derniers temps, pourtant, il ne pouvait plus autant s’impliquer qu’il l’aurait voulu. Ce n’était pas un manque de considération ou d’envie, c’était simplement un manque de force. Il se sentait faible, désormais… De plus en plus soumis au poids d’une longue vie si remplie et souvent fastidieuse. Une vie qui n’avait jamais cessé son train presque infernal.

Ce soir-là, ce dimanche, il tenait pour la première fois dans ses bras les tous derniers venus dans leur grande famille, ses deux nouveaux arrières-petits enfants. Le dos adossé contre un oreiller épais, dans un petit canapé, il tenait dans ses bras maintenant maigres et fragiles son arrière-petit-fils, Kiyo, tandis que la sœur jumelle de cet enfant était retournée dans les bras de sa mère. Il tenait délicatement ce bébé, posé contre lui, et caressait avec douceur les petits cheveux noirs ornant le haut de sa tête. Caque nouvelle naissance était un miracle, à ses yeux, et il était heureux d’avoir vécu assez longtemps pour rencontrer et tenir dans ses bras ses petits-enfants puis ses arrières-petits-enfants. Chacun d’entre eux était un nouveau fruit d’un grand arbre, une perle trouvée dans l’océan, ils étaient tous très précieux à ses yeux. Le contraste, entre ce bébé si jeune encore et lui-même, au crépuscule de sa vie, était des plus saisissants.

Ces petits n’avaient qu’un mois à peine. Si petits et fragiles… Endormis contre les adultes les berçant ce soir. Il conservait un sourire attendri et ému, en tenant ce petit être dans ses bras avec le plus de douceur possible. Naoki savait qu’il allait mourir bientôt et se réjouissait d’avoir pu tenir dans ses bras ces deux enfants. Nés si loin, il avait d’abord cru qu’il ne les verrait pas avant de partir rejoindre ses ancêtres. C’était comme un dernier cadeau de la vie. Il releva le regard vers la jeune épouse Française de son petit fils, sans se départir de son sourire, et lui dit qu’elle avait eu deux très beaux enfants, dont elle pouvait être fière. Les jumeaux avaient été ajoutés il y a peu à l’arbre généalogique de la famille, tout comme leur grand frère et leur grande sœur, plus âgés.

Ils grandiront tous deux fiers de leur famille, ne vous en faites pas, murmura-t-il. La guerre est un drame mais est aussi un mal nécessaire, dans bien des cas. Pour nos enfants, il nous faut combattre. Les âmes perdues sur le champ de bataille restent auprès de nous à jamais, la vie est ainsi faite. Quoi qu’il puisse arriver, désormais, leur père sera auprès d’eux.
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Solène Nakajima
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Solène Nakajima
MessageSujet: Re: Un mal nécessaire   Un mal nécessaire EmptyVen 1 Jan - 16:03

La scène était tout à fait attendrissante et mieux encore, ses enfants se prêtaient au jeu, aucun des deux n’avait été gêné de se retrouver subitement dans les bras d’un inconnu. Solène avait tout d’abord déposé la petite Akemi dans les bras de son arrière-grand-père et la fillette l’avait regardé quelques minutes, avant de s’endormir de nouveau, son petit poing ramenée contre elle, alors qu’elle suçait à moitié son pouce en dormant. Son autre main agrippait sa petite peluche. Elle avait profité de ce temps pour raconter, comme le vénérable homme lui avait demandé, comment s’était passé son accouchement, en France, ce qu’elle avait ressenti, comment le papa avait réagit… Sans vraiment savoir pourquoi de tels détails étaient si importants mais elle n’avait pas voulu froisser le vieil homme en refusant. Qu’il demande à la voir en privé, avec ses enfants, avait déjà été une petite surprise. Il se montrait si peu avec la famille qu’elle avait d’abord cru que sa présence, et celle des enfants, dérangeait, en quelque sorte… Ou que cela l’épuisait bien trop.

Après avoir repris sa fille, il prit avec la même douceur Kiyo dans les bras et le tint contre lui, le regardant avec une telle émotion que Solène ne pouvait s’empêcher de sourire. Et de sourire aussi lorsqu’il lui dit qu’elle pouvait être fière de ses enfants. Le rôle de maman ne lui était pas complètement nouveau, ayant déjà veillé sur les jumeaux de sa sœur sur de longues périodes, avant de les récupérer à plein temps depuis leur arrivée au Japon, mais s’occuper de ses propres jumeaux, de ses propres enfants, c’était encore différent que veiller sur son neveu et sa nièce. Après les avoir porté de si longs mois… Elle se souvenait aussi de la nuit où ils avaient probablement été conçus. Cette soirée si douce avec Kimmitsu, puis les heures dans le noir, ensemble, cette si parfaite nuit… Tout cela était des souvenirs, dorénavant… Ils étaient arrivés au Japon depuis un peu plus d’une semaine, à peine. Les premiers jours avaient été très confus, ce n’était que vendredi dernier qu’elle s’était enfin inscrite à des cours, le matin, pour apprendre la langue et les coutumes du pays.

Cependant, elle n’était pas encore habituée et ne croyait que Laura le soit déjà, elle non plus. Tous étaient très… Disons… Secoué. Genji n’était pas guéri de sa dépression et elles-mêmes n’étaient pas non plus dans une excellente forme mentale. Mais il y avait les enfants. Solène devait à la fois veiller sur les siens et sur ceux de sa sœur, donc quatre enfants, bientôt cinq, lorsque Josuke reviendra avec le nouveau-né de Gabriella. Même entourée de toute la famille, c’était tout de même cinq enfants dont elle devait s’occuper, soigner, nourrir et aimer au quotidien, car les autres mères de la famille avaient aussi leurs propres enfants à s’occuper. Ils étaient bien nombreux, dans cette maison, heureusement qu’elle était si grande. Pour les petits, elle devait être forte, elle n’avait pas le choix ! Si elle se laissait aller ou se montrait fragile, ils le ressentiront et en seront fragilisés à leur tour. Mais comment être sûre qu’elle y arrivera… ? Elle… Elle n’avait pas la même force que ses frères ou sa grande sœur. N’était même pas sûre d’avoir fait correctement le deuil de Paul, leur frère décédé.

– Ils grandiront tous deux fiers de leur famille, ne vous en faites pas, murmura-t-il. La guerre est un drame mais est aussi un mal nécessaire, dans bien des cas. Pour nos enfants, il nous faut combattre. Les âmes perdues sur le champ de bataille restent auprès de nous à jamais, la vie est ainsi faite. Quoi qu’il puisse arriver, désormais, leur père sera auprès d’eux.

Solène s’obligea à doucement hocher la tête, en guise de réponse. C’était une pensée à la fois dure et réconfortante. Dure car elle ne voulait pas imaginer que Kimmitsu puisse mourir, même si elle savait que c’était possible, réconfortante car si l’âme d’un défunt restait effectivement sur terre, alors il pourra tout de même veiller sur ses enfants tout au long de leur existence. Elle regardait Naoki, puis osa enfin formuler ces doutes qui la hantaient. Lui devait savoir… Il avait de l’expérience, il avait connu de nombreux troubles, il avait lui aussi perdu tant de membres de sa famille…

– Dites-moi, souffla-t-elle à voix basse, comment être sûr que l’on saura tenir le choc et continuer de vivre, bien s’occuper des plus jeunes par la suite ? Comment, comment… Comment fait-on correctement un deuil ?
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MessageSujet: Re: Un mal nécessaire   Un mal nécessaire EmptyLun 4 Jan - 19:41

Naoki Nakajima, 81 ans

Avec douceur, le vieil homme reposa le bébé sur le coussin confortable posé près de sa mère, pour ne pas le réveiller. Lui-même fatiguait également et ne pouvait bercer trop longtemps cet enfant, même en restant confortablement assis. Pour des personnes plus jeune, porter un bébé endormi devait paraître bien dérisoire, comme effort… Ils comprendront qu’avec l’âge, même ce simple effort devenait une difficulté, lorsque toute force quittait votre corps. C’était malgré tout une bénédiction, de vieillir, car malheureusement, tous les jeunes de ce monde n’avaient guère cette chance. Il se remit ensuite dans une position un peu plus allongée, contre son propre coussin, notant avec un certain amusement attendri que sa propre position n’était pas sans rappeler celle du bébé qu’il venait de recoucher. Tout n’était qu’une question de cycles.

Dites-moi, souffla-t-elle à voix basse, comment être sûr que l’on saura tenir le choc et continuer de vivre, bien s’occuper des plus jeunes par la suite ? Comment, comment… Comment fait-on correctement un deuil ?

Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon, ma fille. C’est propre à chacun. Mais il est certain qu’avoir une famille dont il faut s’occuper est un moteur très puissant. Tout comme avoir des proches autour de soi. Pour ma part, il me restait un fils et une belle-fille, puis sont venus les petits-enfants. C’est ce qui m’a aidé à supporter la perte de mes garçons… En voyant la naissance de ces nouvelles petites vies, j’ai compris que le monde continuait et que je devais bien poursuivre, moi aussi. Je ne dis pas que ça été facile… Mais il faut le traverser. Cela étant, je ne souhaite à aucun parent de perdre un enfant, il n’y a pas de douleur plus terrible dans ce monde. Même perdre un frère, une sœur ou un parent n’est pas aussi douloureux que voir partir avant soi sa propre chair et son sang, un enfant porté, élevé et aimé, avant qu’il ne vous soit arraché.


C’était bien pour cela qu’il comprenait si bien le choix de son petit-fils d’envoyer ses enfants loin de lui, qu’il comprenait aussi très bien que la sœur de Solène ait choisi de faire de même avec ses propres enfants. Quoi qu’il puisse leur en coûter de les savoir si loin d’eux, ce n’était rien en comparaison de la douleur qu’ils subiront s’ils les perdaient… Naoki tendit doucement la main pour caresser la joue du bébé endormi et ajouta d’une voix plus lente que la vie de son propre bébé n’avait pas de prix, qu’elle valait tous les sacrifices imaginables dans ce monde. Il lui dit qu’il valait bien mieux mourir soi-même cent fois que de laisser souffrir une fois son bébé. Beaucoup de personnes ne pouvaient comprendre ça, ce qui était bien, dans un certain sens… Oui, mieux valait rester ignorant de certaines souffrances, dans cette vie, tant que possible.

Les plus jeunes sont la meilleure des raisons, à eux seuls, de continuer à vivre. Un adulte peut surmonter les épreuves, un enfant a besoin qu’on lui tienne la main pour le faire. Si l’adulte s’écroule, il condamne l’enfant à perdre bien trop tôt, et trop jeune, son innocence, et donc le condamne à une vie bien noire et dure. Un parent doit tout endurer et garder le sourire, pour eux. Même en plein deuil, on ne montre pas ses larmes ou ses peurs à son propre enfant. Vous comprenez ?

Le ton était doux, le sujet était très grave. Le vieil homme ne lui disait pas cela pour la faire pleurer, néanmoins, simplement pour qu’elle comprenne le rôle qui était désormais le sien. Il en était passé par là… Il n’avait bien sûr jamais partagé avec ses fils toutes les peurs qu’il avait pu ressentir, ses doutes et ses sombres pensées, il ne leur avait jamais parlé de ses cauchemars ou de ses problèmes. Un parent ne doit pas mêler ses petits au moindre de ses soucis, jamais ! Que ce soit des soucis familiaux, des soucis financiers ou que savait-il encore. Jamais, au grand jamais. Car c’était très destructeur d’impliquer ainsi une jeune âme dans les troubles d’un adulte responsable de lui. C’était pousser ce petit être à avoir peur, douter et s’emplir d’angoisses qu’il n’avait pourtant pas à porter.

Le deuil en lui-même, reprit-il lentement, se fait avec la famille, les amis, la Foi, pour ceux la possédant. C’est un processus lent… Plus ou moins long selon chaque personne et sa sensibilité. Mon propre père me disait souvent qu’à trop pleurer les morts, on s’empêche soi-même de voir leurs âmes briller dans la nuit. Lorsqu’une personne part pour une cause qu’elle a choisi de défendre, pourquoi la pleurer ? Il faut au contraire témoigner son respect, pour la vie qu’elle aura menée, pour ce qu’elle aura donné jusqu’à la fin. Être fier de qui elle a été.
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Solène Nakajima
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Solène Nakajima
MessageSujet: Re: Un mal nécessaire   Un mal nécessaire EmptyMar 19 Jan - 9:24

– Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon, ma fille. C’est propre à chacun. Mais il est certain qu’avoir une famille dont il faut s’occuper est un moteur très puissant. Tout comme avoir des proches autour de soi. Pour ma part, il me restait un fils et une belle-fille, puis sont venus les petits-enfants. C’est ce qui m’a aidé à supporter la perte de mes garçons… En voyant la naissance de ces nouvelles petites vies, j’ai compris que le monde continuait et que je devais bien poursuivre, moi aussi. Je ne dis pas que ça été facile… Mais il faut le traverser. Cela étant, je ne souhaite à aucun parent de perdre un enfant, il n’y a pas de douleur plus terrible dans ce monde. Même perdre un frère, une sœur ou un parent n’est pas aussi douloureux que voir partir avant soi sa propre chair et son sang, un enfant porté, élevé et aimé, avant qu’il ne vous soit arraché.

Elle… pouvait comprendre, désormais… Il y a quelques mois encore, non, elle ne l’aurait pas saisi, mais aujourd’hui… Elle pouvait très facilement comprendre. Perdre son frère avait été atroce, son deuil n’était pas encore achevé, loin de là, pourtant, si elle devait perdre aussi son propre enfant, elle ne supporterait pas, c’était clair et net. Sa mère aussi, un jour, lui avait dit qu’aucune horreur n’était comparable à celle de perdre son bébé, sur le moment, Solène en avait douté, tant il y avait d’horreurs possibles dans ce monde, des horreurs terribles ! Et à présent qu’elle était devenue mère à son tour, oui, elle comprenait. C’était aussi ce que lui expliquait le vieil homme, d’une voix douce, tout en chatouillant doucement la joue du petit garçon endormi sur le large coussin. Solène se redressa et déposa également sa sœur près de lui, étant donné qu’elle s’était également rendormie et que sa mère craignait de la réveiller en tremblant ou… Enfin, de la déranger, ce n’était pas le but. Elle ira les mettre au lit toute à l’heure, en allant elle-même se coucher.

Malgré tout, elle peinait toujours à comprendre comment cet homme avait réussi à surmonter sa peine après la perte de presque tous ses fils, même s’il avait eu ensuite des petits-enfants… A ses yeux, avoir une famille était très bien mais ne faisait pas tout. Il fallait aussi… Avoir des projets, en quelque sorte, d’autres raisons de s’accrocher, pour continuer à vivre. Des choses à faire… Pour vivre pour soi, pas seulement pour les autres. Et une certaine force de caractère… Tout le monde ne gérait pas le deuil de la même manière. La seule chose qui était « bien », finalement, pour eux qui étaient partis au Japon et fuis la guerre, c’est qu’ils avaient à la fois le temps et la tranquillité d’esprit nécessaires pour pleurer leurs morts et s’apaiser peu à peu. Leurs proches, restés derrière, n’avaient pas cette chance. Comme l’avait répété plusieurs fois Bradley, ils n’avaient pas le luxe de s’effondrer dans un coin, encore moins de se laisser un peu aller, car sinon, eux-mêmes ne survivraient pas à cette époque.

Rester solide pour soi-même, pour son enfant, c’était essentiel, mais difficile à mettre en œuvre. Elle fera tout son possible, évidemment ! Simplement, elle, elle… Elle ne pouvait dire encore si elle y parviendra pour de bon, se sentant fragile, même en étant entourée. Toute jeune mère, comment être sûr qu’elle était capable de faire front ? Avec le temps, et son entourage, cela dira. ?… sans doute… C’était difficile de se projeter dans l’avenir, pour le moment. Solène ne pouvait s’empêcher de penser à la France, voir leur venue ici comme un simple « passage », alors qu’elle savait très bien que ce simple passage pouvait durer des mois, des années ! Voire même une vie entière. Si elle devait perdre toute sa famille en France dans la guerre, pourquoi y retourner ? Elle n’y retrouvera rien, si ce n’est des souvenirs douloureux et les tombes de ses frères et de sa sœur. Paul était déjà parti à jamais… Elle ravala un très long soupir, les yeux un peu humides, mais les larmes ne coulaient pas.

– Le deuil en lui-même, reprit-il lentement, se fait avec la famille, les amis, la Foi, pour ceux la possédant. C’est un processus lent… Plus ou moins long selon chaque personne et sa sensibilité. Mon propre père me disait souvent qu’à trop pleurer les morts, on s’empêche soi-même de voir leurs âmes briller dans la nuit. Lorsqu’une personne part pour une cause qu’elle a choisi de défendre, pourquoi la pleurer ? Il faut au contraire témoigner son respect, pour la vie qu’elle aura menée, pour ce qu’elle aura donné jusqu’à la fin. Être fier de qui elle a été.

Solène n’avait absolument jamais vu les choses sous cet angle… Ça l’en laissa un peu perplexe et perturbée, tout à coup. Pourtant, c’était très logique ! Mais… heu… Elle pouvait par contre parfaitement imaginer sa sœur, même blessée ou mourante, lui demander en riant pourquoi elle pleurait, que ce n’était pas la fin du monde non plus. Mais de là à être fier ou heureux ! C’était… Secouant un peu la tête, la jeune mère commença par répondre, dans un bref balbutiement, qu’il y avait tout de même un monde entre être triste pour le décès d’un proche et fier car il avait suivi ses convictions jusqu’à la fin. Très franchement, elle ne voyait pas du tout comment concilier les deux !

– Comment en arriver là ? Ce n’est pas possible… On ne peut pas ne pas pleurer le décès d’un proche.
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MessageSujet: Re: Un mal nécessaire   Un mal nécessaire EmptyVen 29 Jan - 21:43

Naoki Nakajima, 81 ans

Elle ne comprenait pas. Pas tout de suite. Bien entendu, c’était normal. Elle comprendra grâce au temps. Lui aussi avait compris grâce au temps… Lorsqu’il avait l’âge de cette jeune femme, lui non plus n’avait pas compris ces dernières paroles prononcées par son père. Puis la vie avait fait son office, l’expérience accumulée, les joies, les peines, tout cela l’avait fait grandir, et enfin, il avait compris. Ce n’était pas grave si tout cela prenait du temps. Chaque personne… était différente… Chaque personne se développait à son rythme propre. Chacune menait son existence comme elle le pouvait. Il aurait pu le lui dire aussi… Mais il était si fatigué… Si fatigué… Il ne pouvait lui expliquer cela, elle comprendra… Seule… Plus tard… Elle était si jeune encore. Une belle enfant, débutant à peine la découverte du monde des adultes. Il lui sourit doucement, attendri.

Comment en arriver là ? Ce n’est pas possible… On ne peut pas ne pas pleurer le décès d’un proche.

Pleurer un défunt et être fier de ce qu’il a accompli de son vivant sont deux choses différentes, ma petite… Vous comprendrez. Pensez simplement à la vie, non à la mort. Vous avez le temps… Vous ne penserez à la mort que lorsqu’elle viendra vous trouver. En attendant, chérissez la vie.


Il murmura ensuite qu’il avait besoin de se reposer, maintenant. Il lui sourit une dernière fois, puis la regarda partir, avec ses bébés dans les bras, hors de la chambre. Une fois seul, dans la pénombre de la pièce, lumières teintes, il observa tout un moment les doux reflets de la lune contre les murs et les multiples photos posées dans cette pièce. Toute sa famille était ici, rassemblée, au grand complet. Son épouse, partie avant lui, leurs enfants, tous leurs garçons… Les épouses de leurs fils. Leurs petits-enfants. Leurs arrières-petits-enfants. Tous étaient là, souriants et sérieux sur les clichés en noir et blanc ou en sépia. Debout, assis, posant ou pris par surprise, ils étaient tous là et l’entouraient. Avoir vu une si belle et grande famille, s’agrandir au fil des générations. Ça n’avait pas toujours été évident, certes, mais ils étaient là, les petits derniers comme les plus âgés.

Son regard resta posé sur la plus grande des photos, celle de sa défunte épouse, Mai, installée bien au centre, devant toutes les autres. C’était elle qu’il regardait chaque soir, avant de s’endormir. Il l’admirait comme au premier jour, l’aimant encore, bien sûr, bien qu’elle soit partie depuis plusieurs années. Il lui sourit, toujours émerveillé devant son sourire si doux et ce regard chaleureux qui l’avait toujours accompagné. Ce soir, un rayon de lune s’étalait sur sa photo, faisant plus encore ressortir son beau sourire. Il sentait… Il sentait, sans pouvoir se l’expliquer, qu’il était enfin sur le point de la revoir. Il avait si hâte ! Hâte d’être de nouveau après d’elle, comme aux premiers jours, de la serrer dans ses bras, la retrouver après trop de temps séparé d’elle. Il lui sourit et laissa doucement sa tête retomber contre l’oreiller. La fatigue l’écrasait mais ne l’étouffait pas. Ses yeux se fermèrent, il emporta dans ses pensées le doux sourire de Mai…

Durant de longues minutes, le bruit régulier de son souffle fut le seul son troublant le silence paisible de cette chambre. Naoki pensait à sa femme. Il l’emmena dans ses rêves. Puis lentement, le rythme de ses respirations ralentit, s’estompa, puis cessa. Son cœur cessa de battre et son esprit partit enfin rejoindre son épouse, dans le prochain monde…
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