Avril 1932. Les soucis mondiaux s'étendent.
 
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 Premières fleurs

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Anonymous Invité
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MessageSujet: Premières fleurs   Premières fleurs EmptyVen 20 Juin - 15:59

Daniel s'accroupit au pied du grand chêne et enleva délicatement les feuilles mortes. Son visage s'illumina d'un grand sourire lorsqu'il la fleur rouge minuscule qui sortait de terre. Le printemps approchait enfin, il arrivait à grands pas ! Et ce n'était franchement pas trop tôt. Outre le fait que l'hiver avait été particulièrement costaud et long, ils avaient eu beaucoup de neige, et Daniel avait horreur de ça. Oui, d'accord, c'était très joli, on pouvait jouer avec, faire des bonhommes de neige, glisser dessus, etc, mais c'était plus fort que lui. Il ne voyait que le côté "glacial, mouillée, gelée, qui fond dans vos chaussettes en vous rendant malade". Depuis tout petit, il avait toujours considéré l'hiver comme une période bien trop longue et démoralisante. La seule chose qu'il appréciait, c'était les bons feus de cheminée. Valentin arriva tout à coup vers lui, traînant sa jambe raide, des ballons dans les bras. Daniel se redressa souplement, secouant la terre qui s'était accrochée à son pantalon.

- Tu rêvassais ?

- Un peu, j'attends que la chaleur revienne.

- Tu peux te réchauffer en courant ! Va falloir penser à préparer la compétition sportive de fin d'année, tu sais. On fera ça juste après les examens écrits du moi de Mai.

- Nous ne sommes que début Mars ! On ne va pas se mettre sur ça dès maintenant, non ?

- Bien sûr que si.

Daniel secoua légèrement la tête en voyant l'air décidé de son collègue. Bon, très bien, ils allaient se pencher sur tout ça. Il l'aida à transporter puis ranger les ballons, tout en discutant de tout et n'importe quoi. Ils croisèrent quelques militaires qui ne firent pas attention à eux, occupés à parler d'il ne savait quoi. Valentin, en revanche, leur jeta un regard très noir, lourd de menace. Son jeune collègue savait pourquoi... L'ancien combattant des tranchées avait pu récemment goûter à "l'hospitalité" des soldats, et s'il refusait de parler de ce qu'il avait vécu, cela n'avait pas dû être très drôle.

Daniel n'avait plus cours aujourd'hui, et l'après-midi touchait de toute manière à sa fin. Il s'étira comme un petit avec un léger soupir, alors que Valentin griffonnait le planning de la semaine suivante sur le tableau, pour la disponibilité des salles et des différents terrains. Daniel y jeta un œil, enfilant sa veste pour retourner vers les bâtiments principaux du pensionnat, à l'écart des différentes salles de sport.

- Les sixième n'ont plus gym ? Tu as changé de programme ?

- Ce sera natation dès qu'il fera plus beau. Me suis rendu compte que la moitié d'entre eux ne savent pas nager...

Il poussa un petit grognement, puis lui fit un signe d'au revoir avant de sortir. Daniel suivit le mouvement et retourna dehors, se dirigeant d'abord vers le lac, avant de rentrer dans ses appartements se reposer un peu et préparer le matériel dont il aura besoin demain. Il marchait autour depuis une dizaine de minutes, lorsqu'il aperçut une mince silhouette et des mèches rousses agitées par le vent. Il sourit et s'approcha, saluant sa collègue Alice, assise sur un rocher au bord du lac. Il lui trouvait un air triste, comme si elle venait d'apprendre une mauvaise nouvelle. A moins que ce ne soit de la mélancolie, il l'ignorait.

- Tu cherches à déterminer si l'eau est assez chaude pour se baigner ? demanda-t-il en s'asseyant sur le rocher à côté du sien.

Il n'aimait pas la voir ainsi, comme "éteinte". Se penchant, il posa la main sur l'herbe et se concentra. Un camélia jaillit peu à peu do sol, rouge et éclatant. Lorsqu'il fut arrivé à maturité, il le cueillit puis le tendit à sa collègue avec un sourire très doux.

- Je pense que ceci s'accordera parfaitement à la couleur de tes cheveux.
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: Premières fleurs   Premières fleurs EmptyLun 30 Juin - 11:30

La journée avait été épuisante. Les cours de la matinée s'étaient bien déroulés, mais les militaires s'étaient invités à tous ceux de l'après-midi, sans crier gare. Elle débutait une leçon lorsqu'ils avaient frappé et étaient entrés avant même qu'elle n'eut eu le temps d'ouvrir la bouche ou de se rendre jusqu'à la porte, la laissant outrée d'un tel manque de savoir-vivre et d'éducation. Ses élèves les avaient eux aussi fixés, les yeux écarquillés. Ils avaient décrétés qu'ils allaient passer l'après-midi à surveiller ses différentes classes afin "d'observer les progrès de ses élèves et vérifier que tout se passait en parfaite sécurité". Bah voyons... Depuis quand la sécurité des élèves du Pensionnat était l'une de leurs préoccupations, eux qui ne faisait que les harceler depuis leur arrivée ici, on se le demande ? En plus de ça, ils avaient effrayé la moitié de la classe, et perturbé tout le monde.

Bien sûr, les cours des éléments étaient plus suivis que les autres, mais Alice pensait surtout que quelqu'un avait dû aller baver que ses cours à elle étaient trop dangereux, qu'il y avait régulièrement des blessés, et qu'elle leur enseignait des techniques dangereuses. Soit, elle assumait parfaitement ce dernier point ! En revanche, elle ne voyait pas comment on pouvait espérer apprendre à manier le feu sans se brûler au passage... Durant tout l'après-midi, elle dû peser avec soin chacun de ses mots et de ses gestes, jetant à la trappe certains exercices et faisant bien plus de théorie que prévue initialement. Ces messieurs observaient, notaient beaucoup de choses, ce qui avait le don de la rendre nerveuse puis partirent finalement sans un mot ni un regard. Alice leur avait adressé un geste parfaitement grossier avant qu'ils en sortent, faisant sourire certains, mais l'après-midi n'avait rien eu de très drôle.

Après les cours, Alice remonta dans ses appartements et eut un très long soupir. L’atmosphère devenait irrespirable, et elle commençait à se demander si sa famille n'avait pas raison lorsqu'elle l’exhortait à donner sa démission et à quitter le Pensionnat avant qu'il ne lui arrive un malheur. Ils lui envoyaient beaucoup de lettres, la suppliant presque de revenir à la ferme familiale. Elle pourrait revenir travailler et vivre avec eux, dormant chaque soir dans un foyer chaud et soudé. Alice s'assit dans un fauteuil pour relire leur dernière lettre, alors que son chat, qu'elle avait baptisé Biscotte, venait se frotter contre ses jambes.

"Ma chérie,

Comment vas-tu ? J'aimerais un peu plus de nouvelles, que tu m'en dises plus sur ta vie, ta santé. Beaucoup de rumeurs nous parviennent, depuis que les ennuis ont commencé, sur l'endroit où tu travailles. Je sais que tu aimes ton métier, ma puce, mais ne peux-tu sérieusement songer à revenir dans les Alpes ? Tu pourrais être institutrice à l'école du village, ou même au collège si tu le désires. Tu nous manques. Nous nous sommes si peu revus depuis que tu nous a quitté, à dix-sept ans. J'ai besoin de te voir évoluer, au moins de temps en temps. Et j'ai très peur pour toi, Alice. J'ai très peur, à cause de ce qui se passe en ce moment. C'est une mère qui parle en te demandant de revenir dans ta famille.

Tu pourrais retrouver ta place à table, ta chambre, un foyer chaud et heureux. Tu pourrais de nouveau vivre et travailler dans ta famille. Qui sait, peut-être l'un des hommes du village te plairait ? Je pense sincèrement que tu serais heureuse, que tu pourrais fonder un foyer à l'abri de nos montagnes, comme tu l'as pu durant ton enfance. Tout le monde te connait et attend ton retour ici.


La lettre se poursuivait dans la même veine. Alice fit la moue et la reposa sur la table, avant d'enfiler sa veste et de sortir, éprouvant tout à coup une forte envie de prendre l'air. Repartir chez elle, dans une famille qu'elle avait quitté à dix-sept ans pour goûter à la liberté ? Non... L'idée était certes tentante, mais comment échanger sa passion avec la paix ? Elle aimait son métier, elle aimait apprendre à des jeunes à contrôler cette école, elle aimait cette école où elle n'avait pu étudier en tant qu'élève mais qu'elle découvrait en tant que professeur.

- Quitter tout cela ? murmura-t-elle en regardant le lac et en s'asseyant sur un rocher.

Elle regarda le lac en silence, réfléchissant. La raison lui conseillerait en effet de partir, mais elle ne pouvait s'y résoudre. Elle ne voulait pas partir, ni tout abandonner. Un foyer, une famille, un nouveau métier ? C'était attirant, mais pas suffisant. Elle comprenait la peur de sa mère, et pourtant.

- Tu cherches à déterminer si l'eau est assez chaude pour se baigner ?

Elle sursauta légèrement et tourna la tête. Daniel venait de s'asseoir sur le rocher à côté d'elle, aussi souriant qu'à son habitude. Elle essaya de sourire à son tour mais n'y parvint pas, prise par le doute et la mélancolie. Malgré cela, elle ne tenta pas de chasser Daniel. Elle préférait largement le voir lui plutôt qu'un militaire, ou même un élève, et il était agréable à vivre. Mignon, en plus. Il se pencha tout à coup et posa la main au sol. Que faisait-il ? Elle ne posa pas de question, voyant son air concentré, et haussa les sourcils en le regardant faire naître une fleur. Que voulait-il en faire ? Il la cueillit, puis la lui offrit, avec un sourire qui en aurait fait fondre plus d'une.

- Je pense que ceci s'accordera parfaitement à la couleur de tes cheveux.

Alice devint aussi cramoisie que ses cheveux, et prit la fleur en tremblant légèrement. Puis elle bafouilla un merci, souriant malgré elle. C'était si délicat, comme attention, elle en s'attendait vraiment pas à ce qu'il fasse ça pour elle. Déposant la fleur sur ses genoux, elle attacha rapidement ses cheveux, puis y inséra le camélia, rendant son sourire à Daniel. La fleur sentait très bon, et elle admira une fois de plus le pouvoir de ceux qui pouvaient manier la terre. C'était un don souvent sous-estimé, alors qu'il était précieux, et nettement moins agressif que le feu ou la foudre.

- Merci beaucoup, dit-elle en l'embrassant sur la joue.

Ce n'était pas seulement merci pour la fleur, amis merci car il venait de la distraire, de l'arracher à des pensées peu joyeuses, merci car il avait le don d'égayer la journée d'une personne. Elle toucha la fleur du bout des doigts, les joues un peu roses, vérifiant qu'elle tenait bien.

- Mais il ne faudrait pas que tu le refasses devant tes élèves, elles vont être jalouses, sourit-elle en le regardant. Tu verrais comment elles te regardent, pendant les cours, tu leur fais un sacré effet.

Les autres professeurs aimaient à faire courir des rumeurs pour rire sur Daniel et l'agitation qu'il causait parmi les filles. Il était apprécié, très apprécié, et les cours de sport suscitaient un regain d'intérêt chez les jeunes filles depuis qu'il avait été embauché.

- D'ailleurs, maintenant que j'y pense, que faisais-tu avant d'arriver au pensionnat ?
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Anonymous Invité
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MessageSujet: Re: Premières fleurs   Premières fleurs EmptyMer 2 Juil - 0:03

Un instant, Daniel eut peur que son petit cadeau ne se termine sur un échec cuisant. Qu'Alice le prenne pour un idiot, qu'elle rit de cette marque d'attention ou s'en moque, qu'elle trouve cela complètement stupide, inutile ou que savait-il encore, qu'elle lui réponde qu'il ferait mieux de faire des choses plus utiles dans sa vie que de faire pousser des fleurs, qu'elle n'avait pas que ça à faire, qu'il perdait lui-même son temps, ou qu'ils avaient passé l'âge de jouer à ce genre de jeux puérils avec leurs dons, qu'ils étaient adultes, donc responsables, et devraient se comporter comme tel. Oui, faire pousser des camélias pouvait être puéril, mais il avait suivit son inspiration du moment. N'ayant jamais été très doué avec les femmes, il ignorait bien souvent la meilleure façon d'en aborder une, et cela pouvait déboucher sur des situations totalement ridicules ou incontrôlables.

Cependant, les joues d'Alice se colorèrent d'un beau rouge bien prononcé et elle accepta la fleur avec un petit tremblement à peine perceptibles, et elle accepta la fleur. Première étape réussie, mon capitaine ! Il n'en revenait pas que cela ait fonctionné aussitôt. Comment aurait-il pu savoir qu'elle appréciait les camélias ? Malgré les jours qu'il avait passé à la suivre et l'observer dans la salle des professeurs, il n'avait jamais pu déterminer ses goûts avec précision. Elle était hors de son atteinte, et excepté le café, qu'elle semblait aimer, il n'avait pas appris grand-chose. Par exemple, là, il ignorait que ses cheveux attachés de cette façon mettaient autant son visage en valeur. Il eut un sourire en la regardant, gêné malgré tout.

Daniel n'avait jamais su s'y prendre avec les femmes, et c'était pire avec ses collègues féminines, au Pensionnat, depuis son arrivée. Il y avait Emma, la plus jeune de l'équipe, qui buvait de l'alcool comme de l'eau et qui sortait souvent pour fumer, parlant comme si elle sortait tout juste de prison et qui ne manquait pas de caractère. Un caractère de cochon, surtout. Sarah était à peine plus âgée, mais ressemblait beaucoup à Emma, et avait la manie de s'enflammer pour un rien. Estelle était si effacée qu'on pourrait passer devant elle sans la voir, et aimait un type qui était une véritable ordure. Gabriella, elle, était le type même de femme avec qui il marchait sur des œufs pour ne surtout pas l'énerver. Bref, il avait du mal. Beaucoup de mal.

- Merci beaucoup.

Elle se pencha et l'embrassa tout à coup sur la joue. Son cœur se dispersa en des dizaines de papillons qui se mirent à voleter dans son ventre. Il eut un sourire gêné, l'observant, avec la fleur dans les cheveux. Ça lui allait très bien, et il était heureux qu'elle ait accepté. Alice était al seule avec qui il s'entendait très bien, et discutait parfois. Bien sûr, il tâchait de rester en bons termes avec tous ses collègues, mais c'était parfois dur. Très dur. Il passa une main dans ses cheveux très noirs, ne sentant même plus l'air encore bien frais pour la saison. Être à côté d'Alice avait l'art de lui donner chaud, et même chaud dans tous les sens du terme.

- Mais il ne faudrait pas que tu le refasses devant tes élèves, elles vont être jalouses, sourit-elle en le regardant. Tu verrais comment elles te regardent, pendant les cours, tu leur fais un sacré effet.

Ses... élèves... ? Il leur faisait de l'effet ? Heu... Hein ? Il écarquilla légèrement les yeux, perturbé. en quoi leur faisait-il de l'effet, au juste ? Il se contentait d'être un professeur ouvert et sympa, surveillant de près les progrès de chacun, et il n'avait strictement rien fait pour s'attirer une quelconque faveur ! Il fronça ensuite les sourcils, se remémorant les cours qu'il donnait aux filles. Que faisait-il de spécial ? Il ne leur racontait pas de blagues, se contentait de leur parler de sport, et ne faisait pas de traitement particulier à l'une ou à l'autre. Il restait aussi la possibilité que quelqu'un fasse courir des rumeurs dans son dos. Humph, s'il attrapait le petit plaisantin... Mais passons, il mènera son enquête plus tard.

- D'ailleurs, maintenant que j'y pense, que faisais-tu avant d'arriver au pensionnat ?

Il repassa une main dans ses cheveux noirs, les ébouriffant un peu plus, comme à chaque fois qu'il était gêné ou peu à l'aise. Il avait peur de passer pour un incapable ou un parfait idiot, et fit donc une pause avant de répondre, essayant de garder les idées claires, même si c'était très difficile depuis qu'elle l'avait embrassé sur la joue.

- Je donnais des cours de soutien et des cours privés, dans différents endroits. Dans des écoles primaires et des collèges, et j'aidais quelques lycéens lorsqu'ils devaient passer des épreuves sportives.

Il avait une vie assez bohème, avant d'arriver au pensionnat, d'ailleurs... Cheveux plus longs, attachés ou mal coiffés, tenues décontractées, des horaires pas toujours respectés... Il était professeur libre, allant d'un cours à un autre, parfaitement indépendant et autonome. Il voletait d'un endroit à un autre, travaillant ici et là, sans jamais vraiment se poser. Puis vint un jour où il avait compris qu'il devrait peut-être se poser quelque part. Avoir un véritable chez-lui, un endroit où il aurait sa place. Il tenta de l'expliquer à Alice, s'aidant de gestes pour mieux lui faire comprendre son ressenti d'alors. Le besoin d'avoir un endroit stable où vivre et construire une carrière solide. Un endroit où il pourrait se sentir à sa place.

- J'ai vu l'annonce pour un poste, ici. Cet endroit m'a toujours attiré, par ses particularités. Et je ne le regrette pas ! Bon, parfois, j'ai un peu de mal avec certains de nos collègues, mais il n'y a aucun gros problème.

Enfin... Aucun gros problème, oui, mais il y en avait vraiment certains qu'il ne pouvait supporter. Adrien, par exemple, pour ne citer que lui. Il ne comprenait pas comment on pouvait laisser un homme alcoolique et qui fumait comme un pompier être infirmier dans une école ! Cela dépassait entièrement son entendement. Comment pouvait-il soigner des gamins alors qu'il se détruisait lui-même, au juste ?

- Il y a juste la nouvelle bibliothécaire, là... Elle me fait un peu peur, avoua-t-il. Mes élèves me disent que c'est un vampire, et je ne suis pas loin de les croire, honnêtement. Le type avant elle était une ordure imbuvable, mais quitte à choisir, je crois que je le préférais. Je me demande comment les gamins arrivent à lire avec l'épouse de Dracula dans la place.

Il eut un petit rire nerveux et secoua la tête. Ce n'était pas aimable pour leur nouvelle collègue, mais il fallait avouer qu'elle faisait peur. C'était son air, ou... il ne savait pas trop. Elle était encore si jeune, et tout le monde avait l'impression qu'elle avait déjà vécu plusieurs siècles. Après tout, elle était peut-être vraiment un vampire, qui sait ? Être pâle comme ça, ce n'était pas normal ! Et il y avait aussi sa démarche, son air impassible, son regard. Elle avait plus de six cents ans, et elle quittait l'école la nuit pour aller boire le sang des habitants de Gray. Brr.

- Hum, bref, passons, désolé. Dis-moi, tu fais quelque chose de particulier ce soir ? Si non, et si ça te dit, je voudrais bien t'inviter à dîner.
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MessageSujet: Re: Premières fleurs   Premières fleurs EmptySam 5 Juil - 0:58

Il passa une main dans ses cheveux, ce qui la fit se demander si elle l'avait gêné, ou quelque chose de ce goût là. C'était pourtant une question simple, et même normale à poser à quelqu'un qui venait de rejoindre l'équipe enseignante ! Non ? Peut-être que non... Elle craint un moment qu'il soit venu ici pour échapper à un passé douloureux et qu'elle remue le couteau dans la plaie sans avoir fait exprès ou attention. Elle espérait que ce ne soit rien de ce genre et s'en voulut. Elle et sa maudite curiosité ! Elle voulait toujours tout savoir, aimant se tenir au courant des dernières rumeurs ou des ragots, mais si cela blessait son entourage... Cependant, Daniel ne semblait pas en colère. Plutôt... Perdu ? Oui, c'était ça, il avait l'air de chercher ses mots, comme s'il ignorait quoi lui répondre. Était-ce si compliqué ? Ou trop dur à se ramener en mémoire ? Trop délicat ? Elle resta silencieuse, craignant de faire pis que bien si elle ouvrait de nouveau la bouche.

- Je donnais des cours de soutien et des cours privés, dans différents endroits. Dans des écoles primaires et des collèges, et j'aidais quelques lycéens lorsqu'ils devaient passer des épreuves sportives.

Voilà qui ne semblait pas si compliqué. Elle avait imaginé quelque chose de ce genre, d'après ce qu'elle savait de lui et ce qu'elle avait pu observer. Il lui expliqua la vie qu'il menait avant, la laissant ainsi entrevoir une part de son être. Un tout jeune professeur, aux cheveux assez longs, rieur et souriant, qui prenait ce que la vie lui donnait, dispensant ses cours partout où il le pouvait. Cette image la touchait, car elle donnait un Daniel une part de profonde innocence, comme une part d'enfance que les adultes finissent par perdre. Elle le comprenait lorsqu'il expliquait désirer un endroit où se poser et construire sa vie. Elle aussi avait voyagé, cherchant le lieu où elle serait la plus épanouie possible. Ce lieu, elle l'avait trouvé ici, à Ste Famille. Elle s'y sentait bien, et devinait qu'il en était de même pour Daniel. Plus qu'un simple lieu de travail, cette école était devenue un refuge. Et même avec les problèmes actuels, quitter ce refuge était impensable.

- J'ai vu l'annonce pour un poste, ici. Cet endroit m'a toujours attiré, par ses particularités. Et je ne le regrette pas ! Bon, parfois, j'ai un peu de mal avec certains de nos collègues, mais il n'y a aucun gros problème.

Alice ne put s'empêcher de sourire, une main posée sur ses genoux, l'autre appuyée près d'elle sur le gros rocher. Cela, c'était la vie. On ne pouvait s'entendre avec tout le monde, et même si les enseignants s'efforçaient de toujours garder de bonnes relations entre eux, il arrivait bien évidemment qu'il y ait des frictions. Ils restaient humains, et pouvaient se disputer pour des bêtises. Opinions différentes, façon de penser ou de vivre... Il y avait tant de raisons d'en vouloir à une personne ! Mais oit, il fallait tout de même faire bonne figure devant les élèves. Leur montrer ce genre de choses était inimaginable ! Un peu de professionnalisme, s'il vous plaît, d'autant plus que le savoir-vivre et la capacité à savoir faire des concessions étaient vitaux dans un endroit comme un pensionnat, où tout le monde vivait près de tout le monde.

- Il y a juste la nouvelle bibliothécaire, là... Elle me fait un peu peur, avoua-t-il. Mes élèves me disent que c'est un vampire, et je ne suis pas loin de les croire, honnêtement. Le type avant elle était une ordure imbuvable, mais quitte à choisir, je crois que je le préférais. Je me demande comment les gamins arrivent à lire avec l'épouse de Dracula dans la place.

Roh ! Il ne fallait pas dire ça ! D'accord, leur nouvelle collègue était un peu étrange, mais de là à la traiter de vampire ! Elle avait le droit de ne pas être très à l'aise avec les autres, tout comme elle avait parfaitement le droit de cuisiner dans ses appartements au lieu de descendre manger au réfectoire. Un vampire... Les gosses avaient tellement d'imagination ! Surtout lorsqu'on sait qu'Eva était là depuis deux jours. La pauvre, ce devait déjà être dur pour elle d'arriver ainsi en milieu d'année, alors si elle devait subir en plus ce genre de rumeurs ! La prendre pour un vampire était ridicule. Elle était simplement une jeune femme réservée, un peu effacée, et qui avait besoin de temps avant d'accepter d'être plus entourée, voilà tout. Il fallait lui laisser le temps de s'adapter au pensionnat. Alice se promit de lui apporter un gâteau ou des chocolats fait maison en guise de bienvenue. Il ne fallait pas la brusquer, la pauvre petite, elle devait déjà se sentir bien seule. Daniel finira par le voir, lui aussi, elle savait qu'il n'était pas homme à repousser les gens ainsi, sur la base de préjugés.

- Hum, bref, passons, désolé. Dis-moi, tu fais quelque chose de particulier ce soir ? Si non, et si ça te dit, je voudrais bien t'inviter à dîner.

Elle rougit aussitôt, sentant tout son corps s'échauffer, puis eut un sourire radieux. Pour ça, oui, bien sûr que ça la disait ! Comment dire non face à un tel sourire ? Il était décidément on ne plus mignon, rien d'étonnant à ce que toutes les filles de ses classes bavent littéralement à ses cours.

- Avec grand plaisir, répondit-elle en souriant de plus belle. Voilà qui annonce un bien plus belle soirée que si nous allions dîner au réfectoire.

Il restait encore deux bonnes heures avant le repas, cela lui laissait le temps de prendre une bonne douche et de se préparer. Elle en voulait pas y aller avec des tenues qu'elle portait en cours, autant se mettre plus à l'aise. Elle se leva du rocher, époussetant sa jupe pour en débarrasser la poussière et les saletés, puis rajusta la fleur dans ses cheveux, radieuse, avant de se faire bien préciser l'heure. Puis elle l'embrassa de nouveau sur la joue, en profitant sans honte.

- A toute à l'heure ! J'amène de quoi boire et le dessert.

Elle avait fait un gâteau, ce matin, ce qui conviendra à merveille. Elle retourna ensuite vers le pensionnat et ses appartements, ayant hâte de se préparer pour la soirée, aussi guillerette qu'une jeune adolescente à l'heure du premier amour.
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